Danielle Ropars.fr Danielle Ropars.fr St Pol de Léon/Monseigneur de La Marche
Exil de l’évêque de Léon en Angleterre Cependant le danger qu’avait couru le vénérable prélat ne lui permettait plus de rester dans le pays, et il dut songer à chercher un asile en Angleterre ; mais il fallait que son embaquement s’effectuât en secret pour ne pas donner l’éveil à ses persécuteurs. Le dimanche 6 mars, M. de Kermenguy, gentilhomme de la ville de Saint Paul, prévint son fils, de qui nous tenons les détails suivants, qu’il eût à se tenir prêt pour huit heures du soir, afin qu’il allât prendre M. l’évêque au château de la Ville Neuve, près de la ville, et qu’il l’escortât jusqu’à un bateau de fraudeur qui devait le transporter sur le champ en Angleterre. A l’heure fixée, M. de Kermenguy fils, accompagné de M. Salaun de Kertanguy, se rendit à la Ville Neuve, et trouva M. de La Marche tout disposé à les suivre. Ils sortirent ensemble par une porte du jardin qui ouvrait sur la grève, et, conduit par un guide qu’on leur avait donné, ils traversèrent la grève de Painpoul et arrivèrent à la chapelle de Sainte Barbe, située sur un rocher, près de Roscoff, à une lieue de Saint Paul. Là ils virent le bateau du fraudeur échoué sur le sable, dans une petite anse, et, à force de bras, ils réussirent à le mettre à flot. M. de La Marche y monta, après avoir reçu les adieux de ses conducteurs, auxquels il donna sa bénédiction. Il n’y avait dans le bateau ni lit, ni siège ; il ne contenait que des barils d’eau de vie, que le patron voulait introduire en fraude en Angleterre. La traversée était de trente six lieues, et il y avait à craindre que le bateau ne pût échapper à la surveillance de la douane anglaise. Dieu protégea son digne ministre ; le respectable évêque de Léon arriva en Angleterre sans aucun accident. Les prêtres réfractaires enfermés dans la prison de Brest Le directoire du Finistère par son arrêté du 21 avril 1791 avait donné aux prêtres réfractaires la ville de Brest pour prison, en fit enfermer, par son arrêté du 1er juin suivant, soixante dix au couvent des Carmes de Brest. M. de La Marche était trop bon pasteur pour n’être pas profondément affligé de la manière cruelle avec laquelle on traitait les prêtres de son diocèse, détenus au château de Brest. Sa tendresse pour eux lui inspira la lettre suivante, qu’il adressa à l’administration du Finistère. Messieurs les Administrateurs, « C’est au nom de l’humanité que je veux rappeler à votre souvenir une multitude de prisonniers que vous paraissez avoir oubliés dans le château de Brest. C’est par vos ordres qu’ils y ont été conduits ; depuis cinq mois ils sont entassés dans une même salle, placés près de deux infirmeries, où sont traitées de malheureuses victimes du libertinage. La corrupton de l’air, la rigueur de l’hiver, la qualité des aliments ont porté de terribles atteintes à leur santé. Deux déjà ont succombé, un autre a perdu un oeil, environ dix huit ont été successcivement transférés presque mourants à l’hôpital, le reste est languissant. « Ils ne sont prévenus d’aucun crime, seulement on les a soupçonnés de pouvoir en commettre ; mais, Messieurs, emprisonner des hommes, parce que vous appréhendiez qu’ils ne se portassent un jour à exciter des troubles, infliger des peines à des crimes qui n’ont pas été commis encore ; je vois dans cette conduite l’oubli de l’humanité, de la justice, de la raison, la violation des droits de l’homme, de votre constitution, de votre nouvel ordre judiciaire, de l’acte même qui constitue les corps administratifs. « Vous avez juré fidélité à la loi, à la nation, au roi. « La loi ! Vous êtes en opposition avec elle. La nation ! Si elle est le plus grand nombre des habitants du royaume, son cri s’élève contre vous. Le roi ! Par l’organe de son ministre, il vous a fait connaître ses intentions, qu’il ne m’a pas laissé ignorer. « Qu’attendez-vous donc, Messieurs, pour rendre la liberté à ces innocentes victimes, qui ne font entendre aucune plainte contre vous, à ces prêtres respectables que vous avez estimés et que vous estimez encore, si vous avez conservé les principes religieux qu’ils vous ont enseignés. « Ne vous semble-t-il pas qu’il est enfin temps de briser leurs chaînes. Ah ! Messieurs, ils en porteront les marques assez longtemps ; jusqu’au tombeau. Quel terme avez-vous fixé à leurs maux ? Sans doute, vous ne les avez pas condamnés à une mort obscure et lente, et à ne sortir des longues agonies de la prison que pour aller expirer sur un lit d’hôpital. « Je ne crains pas de vous assurer que votre intérêt même doit plaider leur cause auprès de vous. Si vous pensez que cette constitution que vous avez juré de maintenir puisse être consolidée, ne serait-ce pas, après tant de sacrifices, de pertes et de malheurs, par le retour de la justice, de la commisération et enfin le repos. Vous jugez bien que la violation des droits, les traitements arbitraires ne pourront la rendre douce ni désirable à qui que ce soit. «Enfin, Messieurs, la conscience n’est pas en elle-même, et n’est pas pour vous un vain mot. Croyez-vous qu’elle ne vous reprochera pas un jour vos procédés contre de pauvres ecclésiastiques ? Croyez-vous pouvoir contempler avec la sévérité d’une conscience juste, les humiliations, les amertumes, les maladies, les souffrances sous lesquelles vous faites expirer vos semblables ; en vous les exposant, je sens que mon coeur se déchire, le vôtre restera-t-il insensible ? « Il est simple, Messieurs, que je vous paraisse plus coupable que mes fidèles coopérateurs, s’il faut une victime, voici la compensation que je vous prie d’agréer. Dans la dernière lettre pastorale que j’ai adressée, le 20 août, au Clergé et au peuple de mon diocèse, je disais à mes prêtres prisonniers que je me verrais volontiers chargé de leurs fers, pourvu qu’à ce prix ils tombassent de leurs mains. Ce désir que je leur témoignais, je le change aujourd’hui en prière. Rendez à tous une liberté entière et inviolable, et je m’engage à traverser ensuite les mers pour aller me remettre volontairement à votre discrétion. « J’ose croire que vous m’estimez du moins assez, pour vous tenir assurés que, si vous acceptez ma proposition et en remplissez les conditions, je serai fidèle à mon engagement. « Je suis avec respect, Messieurs, votre très humble et très obéissant serviteur, Signé : J. F., évêque de Léon Londres, 20 avril 1792. - N° 10, Queen street
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